Page:Barsalou - L Autre Monde.djvu/14

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Il avait hâte de s’échapper de la poudreuse cité, et d’aller respirer dans les vertes savanes un air libre et pur. Il s’attendait aux émotions brûlantes, aux rencontres merveilleuses, aux aventures inouïes ; il voulait surprendre les secrets de l’Indien, et vivre sous la même cabane, indépendant et fier comme lui ! 11 serra, non sans une vive émotion, la main que lui tendait cordialement son compagnon d’enfance, et s’éloigna avec ses rêves poétiques, laissant Richard supputer le bénéfice probable de ses opérations à la hausse sur le sucre et le café.

II

Dix-huit mois plus tard, deux hommes se rencontraient dans Broadway, à New-York. L’un avait l’apparence libre et jeune, l’allure franche* et presque heureuse ; il portait la barbe longue et le cou dégagé ; ses vêtements, d’une mode inconnue, annonçaient par leur ampleur l’enfant du caprice et de la fantaisie.

L’autre contrastait en tout avec cette riante physionomie. La préoccupation et le calcul perçaient dans ses traits, l’ordre et, l’économie dans son costume. Sa figure ronde et blanche, entièrement rasée, ressemblait à un zéro ; il y avait presque des chiffres dans son regard.

En s’aperce vaut, deux exclamations s’échappèrent simultanément de leurs poitrines :

— Richard !…

— Julien !…

Et les deux jeunes hommes s’embrassèrent avec effusion.

— Eh ! mon cher Richard, voilà deux jours que je te