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SIMILIA SIMILIBUS

Tout le monde s’était précipité aux fenêtres d’abord, puis au dehors. Le grand chemin qui traverse le village était déjà plein d’ombres effarées, courant de-ci de-là, toutes se posant la même question, personne n’y pouvant répondre. Quelques voix éplorées disaient :

— C’est la fin du monde !

Paul, apparemment remis de son éblouissement, et Marie-Anne s’étaient accoudés à la barrière du petit parterre de fleurs donnant sur la route, tous deux silencieux et pensifs, tous deux ayant le vague pressentiment de se voir brusquement arrachés à leur beau rêve et mis tout à coup aux prises avec les plus tragiques réalités de la vie. Quelque chose leur disait de rassembler toutes leurs forces intimes pour franchir ensemble l’abîme qui allait s’entrouvrir sous leurs pieds. Leurs regards perdus semblaient interroger le tableau noir de l’île d’en face, lui demander le mot de l’énigme.

Soudain, du sein de ce lugubre massif qu’ils contemplaient en silence, ils virent surgir une lointaine lueur rouge-sang, aussitôt suivie du même tonnerre que tout à l’heure. En moins