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INTRODUCTION.

aujourd’hui en Basse-Bretagne pour se rappeler le thème et les diverses parties de leurs ballades.

On sait aussi qu’il était défendu aux bardes cambriens, par leurs propres lois, de s’introduire dans les maisons sans en avoir préalablement obtenu la permission, et qu’ils la demandaient en chantant à la porte[1]. C’est un usage auquel les chanteurs bretons ne manquent jamais de se conformer ; leur salut habituel est : « Dieu vous bénisse, gens de cette maison ! Dieu vous bénisse, petits et grands ! » Ils n’entrent que lorsqu’on leur a répondu : « Dieu vous bénisse aussi, voyageur, qui que vous soyez. » Si on tarde à leur répondre d’entrer, ils doivent passer leur chemin.

Enfin, comme les anciens bardes domestiques chez les Gallois[2], ils sont l’ornement de toutes les fêtes populaires, ils s’assoient et chantent à la table des fermiers, ils figurent dans les mariages du peuple, ils fiancent les futurs époux en vertu de leur art, selon d’antiques et invariables rites, même avant que la cérémonie religieuse ait eu lieu. Ils ont leur part dans les présents de noces. Ils jouissent d’une grande liberté de parole, d’une certaine autorité morale, d’un certain empire sur les esprits ; ils sont aimés, recherchés, honorés, presque autant que l’étaient ceux dont ils mènent à peu près la vie, dans une sphère moins élevée.

De l’histoire sérieuse à la chronique légère, de la chronique au roman d’amour, et de celui-ci au simple récit d’une intrigue amoureuse, ou seulement à l’effusion d’un sentiment vif et personnel, la transition est facile. Nous devons même dire que les chants historiques dont le thème est un événement public ou privé peu important, et les chants domestiques qui offrent quelques traits piquants par leur actualité, rentrent souvent les uns dans les autres.

  1. Pennant, Tour in Wales, t. I, p. 459 et seq
  2. Myvyrian, t. 11, p. 537.