Avec eux, une vieille Corneille grisonnante, avec elle un jeune Corbeau[1].
Ils sont bien las tous deux, et leurs ailes sont mouillées ;
Ils viennent de par delà les mers, de loin.
Et les oiseaux chantent un chant si beau, que la grande mer fait silence.
Ce chant-là, ils le chantent tout d’une voix, à l’exception de la Corneille et du Corbeau.
Or, le Corbeau a dit : — Chantez, petits oiseaux, chantez.
Chantez, petits oiseaux du pays, vous n’êtes pas morts loin de la Bretagne. —
Dans les plus anciennes traditions bretonnes, les morts reparaissent souvent sur la terre sous la poétique forme d’oiseaux. Cette opinion était particulièrement en vogue au dixième siècle, époque où doit remonter l’inspiration de la ballade qu’on vient de lire ; un barde gallois de ce temps nous l’atteste[2].
La circonstance du déguisement que prend le messager de Bran pour traverser plus sûrement les pays étrangers ; l’anneau d’or qu’il emporte et qui doit le faire reconnaître ; la perfidie de son geôlier, le pavillon noir et le pavillon blanc, tout cela a été emprunté à notre ballade par l’auteur du roman de Tristan, trouvère du douzième siècle, qui eut souvent recours aux chanteurs populaires bretons, comme il l’avoue lui-même[3].
On voit qu’il n’a fait que substituer l’amante à la mère, Iseult à la vieille dame bretonne, dans le dénoûment de son ouvrage, quand