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Page:Barzaz Breiz, huitième édition.djvu/79

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lxix
INTRODUCTION

chants populaires de la Bretagne ont subi, comme on l’a prétendu, une transformation totale quant au fond d’événements, de mœurs et d’idées qu’ils présentent, question déjà à moitié résolue, mais qui mérite d’être complètement traitée.


IX


Les chanteurs populaires, dit Walter Scott, ressemblent aux alchimistes qui changent l’or en plomb; ils corrompent à dessein les œuvres de l’auteur dont ils transmettent les chants à la postérité, au point de leur enlever leur esprit et leur style riginal[1].

Cette opinion nous semble bien exagérée. Les chants traditionnels sont, il est vrai, sujets à différentes altérations, mais qui n’ont rien de systématique. Le plus souvent elles sont le résultat du défaut de mémoire ou de quelque méprise des chanteurs, qui, substituent à des détails originaux d’autres traits empruntés à de vieilles chansons analogues tombées depuis longtemps dans le domaine public. Les lieux communs qu’on rencontre en si grand nombre dans toutes les poésies traditionnelles, et qui semblent cosmopolites, car chaque peuple peut les revendiquer, n’ont pas d’autre raison.

Il arrive aussi, en général, qu’au bout d’un certain nombre d’années, l’événement simple, naturel, historique que l’auteur a chanté, soit seul, soit en collaboration, s’est, en passant de bouche en bouche, singulièrement poétisé. La mort du héros du poëme, pour peu qu’il soit fameux, en entourant sa mémoire d’une espèce d’auréole populaire, y contribue plus que toute autre cause. On recherche, on répète jusqu’aux moindres circonstances de ses aventures; les plus inconnues sont les plus goûtées ; le noyau principal se grossit de la sorte de

  1. Minstrelsy, Introductory remarks on popular poetry.