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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.


Du Couëdic mourut a Brest, le 17 janvier 1780. Les états de Bretagne lui firent élever un monument, et son nom fut cité avec éloge dans l’oraison funèbre des officiers, soldats et matelots bretons, prononcée solennellement devant les états assemblés. Ce que dit le poète populaire relativement au brave timonier le Mang, né a Kervignac, près d’Hennebont, est parfaitement exact. Voici comment l’abbé de Boisbilly, qui prononça l’oraison funèbre, raconte l’événement.

« Les bornes que vous m’avez tracées, messieurs, m’interdisent ici les détails ; elles m’imposent le même silence sur ceux de nos compatriotes qui, témoins de la mort des héros et compagnons de leurs dangers, partagent ici avec eux les honneurs mêmes qu’ils leur rendent. Vos regards réunis préviennent mes pensées, et dérogent pour moi à la loi rigoureuse qui me défend de les exprimer. Si je pouvais moi-même y déroger, combien aurais-je à vous rappeler dans tous les grades militaires de noms qui vous sont chers ? Je vous indiquerais des noms trop peu connus et bien dignes de l’être ; je vous rappellerais surtout les honneurs accordés par le souverain à un homme qui semblait né pour obéir, et que son intrépidité a montré digne de commander. Il voit le pavillon abattu par les coups de l’ennemi ; il le relève, le soutient seul, malgré tous les dangers, et, dans un vaisseau où il occupait le dernier rang, devient la colonne de l’honneur. »

C’est à M. de Blois, de Morlaix, neveu de l’abbé de Boisbilly, que je dois la communication de ce discours, encore inédit. La ballade, qui a dù passer du pays de Vannes en Cornouaille, m’a été apprise par un vieux pêcheur de lîle de Groix, nommé Lozarmeur. M. Imbert, de Quimperlé, neveu du brave le Mang lui-même, a eu aussi l’obligeance de me communiquer des détails précieux, non moins honorables et tout à fait inconnus sur son oncle. Quand la révolution publia le décret qui ordonnait a toutes les personnes décorées sous l’ancien régime de remettre entre les mains du gouvernement leurs distinctions honorifiques, l’héroïque Breton se rendit devant le comité du salut public, avec sa médaille et un marteau.

— « Citoyens, vous m’avez demandé ma médaille ; mais c’est a l’or sans doute que vous en voulez : le voilà, » dit-il en la broyant sous son marteau ; « quant à l’honneur, il m’appartient, personne ne me l’enlèverai » Eu prononçant ces mots, il sortit, laissant le comité stupéfait de la sublimité de son action.

Le Mang est mort vice-amiral.