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meurt pour son pays et pour la liberté, « comme savent mourir les martyrs et les saints[1]. »

Fidèle à sa nouvelle patrie, il la servait pourtant depuis deux siècles avec courage et dévouement ; « il avait exposé sa tête mille fois pour le roi[2], » il ne demandait ni places, ni argent, ni honneurs ; il n’exigeait qu’une seule chose: le respect de ses libertés solennellement garanties. Mais la fidélité à la foi jurée et la reconnaissance ne sont pas toujours les vertus des princes. Elles continuèrent à être les siennes. Rien ne put corrompre sa loyauté, rien ne rebuta son abnégation, rien ne lassa ses sacrifices. Moins d’un siècle après, un jour que le roi avait daigné faire asseoir à sa table un des braves enfants de la Bretagne, pour avoir relevé le pavillon français au milieu des balles ennemies, on entendit le Breton, exalté par la reconnaissance, chanter dans la vieille langue de ses bardes : « Le roi nous estime ! Mille bénédictions de Dieu au roi ! Nobles et peuple, en Bretagne, chantons tous les louanges du roi ! » Et, unissant au nom du prince le nom étonné de la patronne de la Bretagne, il s’écriait d’un accent enthousiaste qui confondait dans un même culte, Dieu, le pays et la royauté : « Chantons les louanges du roi et de sainte Annt, notre bonne marraine[3]. »

Les Bretons allaient être les héros et les martyrs de ce culte nouveau. Après avoir longtemps souffert par la royauté, ils allaient avoir à souffrir pour elle un nouveau surcroît d’oppression. Leur foi sincère, leur patriotisme, leur esprit d’indépendance, leur dévouement à toute épreuve aux fils de leurs anciens chefs nationaux, leur fidélité aux rois, défenseurs naturels, sinon constants, de leur religion, de leur pays et de leur liberté, brillèrent d’un nouvel éclat au milieu des persécutions d’une époque d’odieuse mémoire. Leur cœur alors laissa échapper ce chant sublime, qu’ils mirent en action pendant douze ans :

  1. T. II, p. 463.
  2. Ibid., p. 165.
  3. Ibid., p. 243.