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« Il est douloureux d’être opprimé, d’être opprimé n’est pas honteus ; il n’y a de honte qu’à se soumettre à des brigands comme des lâches et des coupables.

« S’il faut combattre, nous combattrons ; nous combattrons pour le pays ; s’il faut mourir, nous mourrons libres et joyeux à la fois.

« Nous n’avons pas peur des balles : elles ne tueront pas notre âme ; si notre corps tombe sur la terre, notre âme s’élèvera au ciel.

« En avant, enfants de la Bretagne ! nos cœurs s’enflamment ; la force de nos deux bras croît. Vive la religion !

« Vive qui aime son pays ! vive le jeune fils du roi ! et que les bleus s’en aillent savoir s’il y a un Dieu !

« Vie pour vie ! Amis, tuer ou être tué ! il a fallu que Dieu mourût pour qu’il vainquît le monde.

« Venez vous mettre à notre tête, gentilshommes , sang royal du pays ; et Dieu sera glorifié par tous les chrétiens de la terre[1]. »

Dieu l’a été en effet ; peut-on en dire autant de la royauté ? Du reste, elle a fourni aux Bretons l’occasion de mettre en pratique leur plus belle vertu, la résignation ; et l’histoire leur adressera l’éloge qu’adressait Louis XIV à leurs ancêtres : « Ils n’ont retiré de leurs généreuses actions d’autre récompense que la gloire de les avoir faites. » Aujourd’hui qu’ils ont tout perdu, leur existence nationale, leurs institutions, leurs libertés, si larges et si nombreuses, que leur pays était le seul de France, selon la remarque de M. Thiers, qui n’eût lien à gagner à la révolution ; aujourd’hui qu’ils balancent en pleurant le berceau de l’humaine espérance morte, pour me servir de leur sublime et mélancolique image, ils demeurent indifférents à tous les changements purement politiques : ils savent qu’ils n’en profiteront pas. « Les pauvres seront toujours pauvres, disent-ils ; les vieux rois ont pu revenir, le vieux temps ne reviendra pas ; le blé est toujours mauvais dans la terre mauvaise : bien fou

  1. T. II, p. 239.