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JOURNAL

— Tenez-vous donc en place, ne remuez pas, respirez !

— Eh bien, monsieur ? avons-nous demandé toutes les trois ensemble.

— Eh bien, c’est bien. — Faites-lui faire un (Ah ! diable, j’oublie le mot qu’il a dit.)

L’accompagnateur me fit faire le, peu importe le nom ; il m’a fait parcourir toutes mes notes.

— Jusqu’au si naturel, dit-il au vieux.

— Oui, c’est un mezzo-soprano ; d’ailleurs c’est beaucoup plus avantageux, beaucoup plus avantageux pour la scène.

Je restais toujours debout.

— Asseyez-vous, mademoiselle, me dit l’accompagnateur en m’examinant de la tête aux pieds.

Je m’assis sur le bord du canapé.

— Enfin, mademoiselle, dit le sévère Wartel, il faut travailler, vous arriverez.

Il me dit encore plusieurs choses concernant le théâtre, le chant, l’étude, tout cela de son air impassible.

— Combien de temps faut-il pour former cette voix ? demanda Mme de M…

— Vous comprenez, madame, que cela dépend de l’élève, il y en a qui devancent le temps, celles qui ont de l’intelligence.

— Celle-là en a plus qu’il n’en faut.

— Ah ! tant mieux ! Dans ce cas, c’est plus facile.

— Mais enfin, combien de temps ?

— Pour la bien former, pour la finir, trois grandes années… oui, trois grandes années de travail, trois grandes années !

Je me taisais et méditais une vengeance contre le per-