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JOURNAL

j’adore les maisons et les rues. C’est mon pays après tout.

Je voudrais à présent quitter Paris, j’ai l’esprit égaré et me sens perdue. Je n’attends plus rien ; je n’espère plus rien. Je suis une désespérée, résignée. Je pense, je pense, je cherche et, ne trouvant rien, je pousse un de ces soupirs qui me font plus oppressée qu’avant. Voyons, qu’auriez-vous fait à ma place ? Maintenant que je suis dans cet impitoyable Paris, il me semble que je n’ai pas assez regardé la mer, je voudrais la revoir. Vous savez, cette pauvre Bagatelle (chien) écrasée à Spa et guérie si miraculeusement, je l’ai ramenée avec moi. C’était pitié que de la laisser làbas toute seule. Vous ne vous imaginerez jamais la bonté, la fidélité et l’attachement de cette bête. Elle ne me quitte pas, se met toujours sous ma chaise et se cache avec une figure si humble et si suppliante, quand ma tante vient pour protéger les tapis. Mardi 4 mars. J’ai

été voir Mme G… et nous sommes sorties ensemble ; elle a fait quelques visites, et pendant ce temps-là j’ai lu des journaux dans la voiture. Il

y avait chez elle la comtesse Murat avec sa bellefille. Ah ! oui, M. G… est validé enfin ! On parle avec enthousiasme du départ du prince, et puis on pleure sur le danger qu’il peut courir, et l’on s’extasie sur son énergię. Il n’a consulté personne ! Et puis si ces bons Zoulous mangent du Napoléon, on ne sera pas trop désespéré. Lui mort, plus de parti, plus d’obligations ; on se tourne vers cette coquine de République, qui est après tout la seur de l’Empire. Mercredi 5 mars. — Dės demain, je me remets au