Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/134

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
129
DE MARIE BASHKIRTSEFF.

si comme il faut, que je ne crains pas d’aller toute seule passer ma matinée au Louvre. Mais comme, tout en étant distingué, ce chapeau me va, j’ai fait la conquête d’un jeune artiste qui me suit tout le temps et risque un salut dans un corridor où il n’y a personne ; mais je n’ai rien vu et il en a été assez décontenancé. Mardi

15 avril. Julian est entré en annonçant la mort de notre Empereur ; j’en fus tellement saisie que je n’y comprends rien. Tout le monde s’est levé pour me voir : je devins blanche, dės larmes dans les yeux, des lèvres tremblantes. Me voyant toujours me moquer de tout, l’aimable Julian a voulu rire ; la vérité est qu’un individu a tiré quatre coups à bout portant et que l’Empereur n’a pas été atteint. Et Julian se tapait les cuisses et s’écriait qu’il ne m’aurait jamais crue capable d’une telle émotion. Mais, ni moi non plus.

Mercredi 1 6 avril. Une conversation assez drôle avec Breslau ; nous étions dans l’antichambre, elle, Sarah et moi. J’ai donné une orange à Sarah qui en offrit la moitié à Breslau, et lui dit en riant : —— Prenez, c’est de moi et pas de Mle Marie, hésitait, j’ai cessé de laver mes pinceaux et, me tournant vers elle : — Je vous l’offre, dis-je, en souriant ; elle en fut tout interdite, prit l’orange et rougit ; moi aussi.

— et comme elle Ce

que c’est que

d’avoir des oranges, dis-je, en en pelant une seconde ; prenez-en encore, Mademoiselle. Regardez donc Sarah, nous avons piqué toutes les deux un soleil !

C’est si bête ! dit Sarah.