Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/159

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
154
JOURNAL

immense dans la loge : fille, beau-fils, petites filles, seurs, tout cela est dans le ravissement. Malheureusement, Tony n’a pas partagé cet enthousiasme. Il a commencé par dire que ce n’est pas mal, et puis… cela ne va pas aussi bien que cela devrait aller. Il est incontestable que je ne suis pas douée au mėme point pour la peinture que pour le dessin. Le dessin, la construction, la forme, tout cela va tout seul. La côté pictural ne se développe pas assez vite. Il ne veut pas que je perde mon temps ainsi. Il faut en sortir, il faut faire quelque chose pour cela. Vous pataugez, c’est évident, et comme vous êtes extrêmement bien douée, comme vous avez de très grandes dispositions, cela m’ennuie. Cela ne m’amuse pas non plus, Monsieur, mais je ne sais qu’y faire.

— Il y a longtemps que je veux causer de cela avec vous. Il faut essayer de tous les moyens, il ne s’agit peut-être que d’ouvrir une porte. — Dites-moi ce qu’il faut faire, une copie, un plåtre, une nature morte ? Je ferai tout ce que vous m’ordonnerez. Vous

ferez tout ce que je vous dirai de faire ; eh bien ! alors, nous sommes certains d’en sortir. Venez me voir samedi prochain, et nous en causerons. Il y a longtemps que j’aurais dû y aller un samedi. Toutes ses élèves le font. Enfin, c’est un bon garçon.

Lundi 10 novembre. Je suis allée à l’église hier ; j’y vais de temps en temps pour qu’on ne dise pas que je suis nihiliste.

Je dis bien souvent pour rire que la vie n’est qu’un