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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

cent marseillais que vingt ans de Paris n’ont pu effacer complètement, et tant mieux. J’aime bien l’accent méridional. Samedi

13 octobre. C’est le samedi que vient à l’atelier M. Tony Robert-Fleury, le peintre qui a fait le Dernier Jour de Corinthe, acheté par l’Etat et placé au Luxembourg. D’ailleurs les premiers artistes de Paris viennent de temps en temps nous donner des conseils. J’ai commencé mercredi passé et samedi de la mème semaine il n’a pas pu venir, de sorte que c’est la première fois pour moi. Quand il fut arrivé à mon chevalet et énonça ses observations, je l’interrompis : Pardon Monsieur…, j’ai commencé il y a dix jours…

— Où avez-vous dessiné avant ? demanda-t-il en regardant mon dessin.

Mais nulle part. Comment, nulle part ?

Oui, j’ai pris trente-deux leçons de peinture pour m’amuser…

Ça ne s’appelle pas étudier. Je sais monsieur, aussi… — Vous n’avez jamais dessiné d’après nature avant de venir ici ?

— Jamais, monsieur. — — Ce n’est pas possible. — Mais je vous assure… Vous n’avez jamais eu de conseils ? — Si… Il y a quatre ans j’ai pris des leçons comme une petite fille, on me faisait copier des gravures. — Ce n’est rien cela, ce n’est pas de cela que je parle. Et comme il paraissait encore incrédule, j’ai dů ajouter •