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JOURNAL

pèlerinage, et de là à Krementchoug où on se promènera sur le Dnieper ; je joue l’impie ou à peu près et les pousse a cette excursion. Après mille et mille tiraillements, on se décide. Vous ne vous imaginez pas, c’est tout une affaire ! Et pourquoi faire ? Et peut-être vaudrait-il mieux ne pas y aller ! Car enfin comment cela se passera-t-il ? Trouvera-t-on à dormir ou à manger ? Enfin, c’est un village, on emmènera Vassil qui fera la cuisine. C’est terrible, il y a une montagne près de Gavronzy qu’on ne peut se dispenser de franchir, par conséquent on devrait y ètre habitué ; eh bien, non, chaque fois, c’est comme si un obstacle nouveau et effrayant venait de surgir. Enfin, après que chacun eut dit à son tour qu’il reste ou que tel ou tel lui a dit qu’il reste, on part en trois voitures : Monsieur et Madame Dina, la Suissesse Catherine, seur de Nini, et Spérandio ; Nini, moi, Paul et Micha. Vers le milieu du chemin, Paul et Micha chantent de très bon ceur, ce qui ébahit les paysans sur la route. Nous trouvons les trois frères Babanine réunis à l’hôlel, Alexandre, Étienne, Wladimir, buvant du champagne. Alexandre parle de ceur, de parenté, de souvenirs de jeunesse ; bref, il est ouvert comme une porte cochère, quand elle est ouverte… Enfin, je devine immédiatement qu’il y a quelque chose. En effet, il vient d’acheter à Étienne sa part d’héritage ; Étienne y a donc passé comme les autres. Il ne resle plus que Nicolas, mais il y passera malgré tous ses cris, et alors Alexandre aura toutes les terres de son père. C’est une force que cet homme, il marche à son but et y arrivera ; c’est une force. Je m’incline et je le respecte presque. Il est brouillé avec Paul et il le mangera ; aussi vais-je les raccommoder