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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Le condamné à mort se promenait dans la cour aussi libre que ceux qui ne sont là que pour un an ou deux, pour des bagatelles.

Plusieurs de ces messieurs préfèrent la cuisine de famille à celle de l’établissement, et leurs gracieuses compagnes leur apportent de délicieux diners, dont Coco ne voudrait certainement pas, nommé l’assassin, on n’a jamais su pourquoi, et qui, chaque fois que ses collègues se conduisaient avec moi comme François Ier avec le Titien, leur sautait dessus sans aboyer, pour mordre plus sûrement. Coco, surSamedi

29 octobre. — — Enfin j’ai vu l’Alhambra, j’ai fait exprès de ne pas m’altarder devant ce qu’il y a de plus beau, d’abord pour ne pas m’attacher à Grenade, et puis le guide qui nous conduisait troublait par sa présence mes jouissances artistiques. Je. me promets de revoir tout cela.

Grenade, vue de la tour, est d’une beauté admirable, complète. Les montagnes couvertes de neige, les arbres gigantesques, les plantes et les fleurs exquises, le ciel pur et Grenade elle-même avec ses maisons blanches, couchée au soleil au milieu de toutes ces beautés de la nature ; les murailles arabes, les tours du Generalife et de l’Alhambra !… Et au loin un vaste horizon, on dirait la mer ; en effet, il ne manque que la mer pour que ce soit le plus beau pays du monde. Quant au palais luimême, il est d’une beauté fantastique. Le costume arabe est certainement le plus beau du monde. Rien n’est comparable à la hautaine élgance de ces draperies’superbes. Je suis empoignée par feu Boabdil et ses Maures, que je réve se promenant dans ce palais unique au monde. L’après-midi, je fais une étude dans une petite rue et,