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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

nature. On vous dira que vous voulez vous moquer des gens.

Eh bien, monsieur, je ne suis pas contente de moi !

Et je le disais, je vous le jure, avec conviction. Pas contente ?

Non ! J’espère bien faire un peu mieux… — Si vous continuez, vous ferez des choses extraordinaires ; ce que vous faites est, je l’ai dit, phénoménal. Il ne s’exprime jamais comme ça devant beaucoup de monde ; cela ferait une révolution. Oui, je serai sans doute mal placée ; ces bourreaux ne savent pas depuis combien de temps je dessine et, ne voyant pas le modėle, ne pourront pas apprécier la ressemblance.

J’avais besoin d’un petit encouragement, car ce matin, je vous assure, j’étais bien bas, Lundi 26 novembre. J’ai enfin pris ma première leçon d’anatomie de quatre heures à quatre heures et demie, juste après le dessin. C’est M. Cuyer qui m’enseigne ; il m’est envoyé par Mathias Duval, qui promet de me faire visiter l’école des beaux-arts. J’ai commencé par les os, naturelle. ment, et un des tiroirs de mon bureau est plein de vertèbres… naturelles… C’est hideux, quand on pense que les deux autres contiennent du papier parfumé et des cartes de visite de Naples, etc.

C’est en rentrant de l’atelier que j’ai trouvé M. Cuyer attendant dans le crépuscule du salon, et sur le canapé opposé j’ai trouvé maman et le plus suisse de tous les commandeurs : Marcuard revenu pour dix jours, qui a baisé ma main pleine de charbon et… qui avait touché