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JOURNAL

autour un paysage délicat, des verts tendres, des roses pâles, des pommiers et des pêchers en fleurs, des pousses nouvelles, tout ce qui rend le printemps d’une couleur enchanteresse. On ne l’a jamais fait avec sincérité. On a fait dernièrement des paysages printaniers, mais on ya fourré des vieux ou des blanchisseuses ou des lépreux. Moi, je veux un parti pris de tons « enchanteurs ». On a fait mille printemps, mais dans des paysages de carton, de chic ; il n’y a que Bastien qui aurait pu penser comme moi, et il ne l’a pas encore fait.-Il faut que cette femme ait l’air d’entendre toutes les harmonies des tons, des parfums et du chant des oiseaux. Il faut qu’il y ait là du soleil. peint que du plein air gris, à l’ombre. Je veux là du soleil et je le ferai à Nice dans un verBastien n’a

ger, et, si je trouve un verger très poétique, ma femme sera nue.

On devra entendre le murmure du ruisseau qui passe à ses pieds,’comme à Grenade, entre des touffes de violettes, et, çà et là, des taches de soleil. Je demande au printemps des tons qui chantent et vont à l’âme ; j’exige des verts tendres, ravissants et des roses påles, enchanteurs, et non pas des blafarderies jaunâtres.

Une orgie de notes douces ; il faut que ce soit d’une couleur ravissante, avec des taches de soleil qui viennent cà et là, donner de la vie et un certain commencement de mystère aux ombres. Comprenez-vous ?.

Mais Bastien fait ou va faire un enterrement de jeune fille ; or, s’il est intelligent, il va lui donner pour décor un paysage comme celui que je rêve. J’espère qu’il n’aura pas tant d’esprit et qu’il nous servira un