Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/472

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
467
DE MARIE BASHKIRTSEFF.

paysage d’un vert infâme… ; pourtant je serais chagrinée s’il ne faisait pas de ce sujet un tableau sublime.

Et je souhaite qu’il ait eu mes idées, tout en souhaitant qu’il ne les ait pas… Moi, je vois son enterrement de jeune fille dans un sentier fleuri, avec des arbres fruitiers en fleurs ou des roses qu’on effeuille, et des têtes grossières de paysans toute la poésie résidera dans le cercueil et dans la comme repoussoirs ;

nature. Je ne lui parlerai de rien. Dimanche 20 mai, — Maman est arrivée dans la nuit du jeudi à vendredi ; nous avons eu une dépêche samedi, où elle dit que la santé de mon père est déplorable. Aujourd’hui, son valet de chambre écrit que son état est désespéré.

On dit qu’il souffre beaucoup, je suis contente que maman soit arrivée à temps. C’est demain que l’on ferme le Salon, pour trois jours, pour voter les récompenses. Jeudi, réouverture. J’ai rêvé qu’on avait mis sur mon lit un cercueil et l’on disait qu’il y avait unejeune fille dedans. Et il resplendissait comme du phosphore, la nuit… Je travaille jusqu’à sept heures et demie. Mais à chaque bruit, à chaque coup de sonnette, à chaque aboiement de Coco, mon âme s’en va dans les talons. Ge que cette expression est juste ! Elle existe aussi en russe. Il est neuf heures du soir et pas de nouvelles. — Voilà des émotions ! Si je n’ai rien, ce sera bien embêtant. – On l’a tellement dit d’avance à l’atelier, et Julian, et Lefebvre, et Tony, entre eux, tous ensemble, que c’est impossible que je ne l’aie Mardi 22 mai.