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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

cela… mais je vais mal… Tout ça est si injuste. Le ciel m’accable…

Enfin, je suis encore en un åge où l’on trouve de l’ivresse même à mourir. Il me semble que personne n’aime autant tout que moi : arts, musique, peinture, livres, monde, robes, luxe, bruit, calme, rire, tristesse, mélancolie, blague, amour, froid, soleil ; toutes les saisons, tous les états atmosphériques, les plaines calmes de la Russie et les montagnes autour de Naples ; la neige en hiver, les pluies d’automne, le printemps et ses folies, les tranquilles journées d’élé et les belles nuits avec des étoiles brillantes… j’adore et j’admire tout. Tout se présente à moi sous des aspects intéressants ou sublimes ; je voudrais tout voir, tout avoir, tout embrasser, me Gonfondre avec tout et mourir, puisqu’il le faut, dans deux ans ou dans trente ans ; mourir avec extase pour expérimenter ce dernier mystère, cette fin de tout ou ce commencement divin. Get amour universel n’est pas une sensation de poitrinaire ; j’ai toujours été ainsi et je me souviens qu’il y a dix ans juste j’écrivais (1874), après avoir énuméré les charmes des saisons diverses : « En vain je voudrais choisir, toutes les saisons sont belles, toute l’année, toute la vie.

« Il faut tout ! Le reste ne suffit pas. « Il faut la nature, devant elle tout est misérable. « Enfin tout dans la vie me plaît, je trouve tout agréable et, tout en demandant le bonheur, je me trouve heureuse d’être misérable. Mon corps pleure et crie, mais quelque chose qui est au-dessus de moi se réjouit de vivre, quand mėme ! » Ce brave et bon T. Robert-Fleury dine ici ce soir ; dit que mes gamins ont beaucoup gagné et qu’en il