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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Vendredi 22 août. — C’est fini, il est condamné ! Baude, qui passe la soirée ici avec l’architecte, le dit à maman.

Baude ost son grand ami ; il lui a écrit une longue lettre d’Algérie.

Celle que j’ai lue. Alors, c’est fini,

Est-ce possible ? Mais je ne me rends pas encore compte de l’effet que produit sur moi cette nouvelle abominable. G’est un sentiment nouveau : voir un homme condamné à mort.

Marde 26 août. Toutes les choses confuses qui papillotaient et qui me remplissaient le cerveau sont maintenant groupées et arrêtées sur ce point noir. C’est un cas qui se présente pour la première fois, c’est du nouveau, un homme… un homme, un grand artiste et… enfin, ce que vous savez… Condamné à mort.

Mais c’est sérieux ça ! Et je vais penser d’avance, tous les jours, qu’il va mourir ? Mais c’est épouvantable ! Je suis déjà ramassée sur moi-même, la téte dans les épaules et j’attends le coup. Ça n’a-t-il pas été ainsi toute ma vie ? Quand le coup vient, je l’attends de pied ferme. Puis je le raisonne, je me révolte et je m’attendris, quand tout est fini.

Je ne peux pas coller deux mots ensemble. Mais ne croyez pas que je suis désolée, je suis seulement profondément absorbée et je me demande ce. que ça va être.