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JOURNAL

Non, vous avez raison de commencer, vous pouvez peindre. Et il y a du bon, il y a du bon… — Je craignais de n’être pas assez avancée pour peindre.

— Du tout, vous êtes assez avancée ; continuez, ce n’est pas mal, etc., etc. Et là-dessus une longue leçon qui prouve que ce n’est pas sans espoir, comme on dit à l’atelier. On ne m’aime pas à l’atelier et à chaque malheureux succès, B… a des regards furieux tout à fait risibles. Mais Robert-Fleury ne croit pas que je n’aie jamais appris à peindre.

Il est resté longtemps, corrigeant, causant et fumant, comme s’il était Carolus. J’ai reçu plusieurs conseils exlra et puis, il m’a demandé comment j’ai été placée au dernier concours de l’année passée. Et quand je dis deuxième. — Et eette année, dit-il, il faudra… Hum ?

C’est si bête, il a déjà dit à Julian qu’il pensait que j’aurais une médaille. Enfin, me voilà sans aucun tirage, autorisée à peindre la nature, sans avoir peint des natures mortes ; je les passę comme j’ai passé les plâtres. Lundi 7 octobre.-Les bêtes vont se dire que j’ai l’intention de continuer Balzac, non ; mais savez-vous ce qui lui permet d’étre si admirable ? C’est qu’il verse sur le papier tout ce qu’il conçoit dans son esprit, toutnaturellement, sans crainte, sans affectation. Presque toutes les personnes intelligentes ont pensé ce qu’il a su écrire, mais qui a pu l’exprimer comme lui ? Cette faculté donnée à un autre esprit, n’eût certaiment produit rien de semblable.