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journal de ma vie.

faveur d’une petite isle de quinse cens pas de tour quy estoit au millieu de ce bras du Danube, entre la grande isle et eux, et qu’ils avoint fait un pont de batteaux depuis leur rive jusques a la petite isle, et comme nous avions, a coups de canon, rompu celuy qu’ils avoint commencé de faire depuis la dite petite isle jusques a celle d’Odom ; ce quy les avoit contraints de passer (lors qu’ils vindrent a nous), sur des chayques et radeaux. Ils garderent encor, depuis la bataille, cette petite isle, et conserverent le pont, quy leur donnoit communication de leur armée a elle. Ils y mirent aussy six canons, desquels ils tiroint a ceux quy s’approchoint.

Le general s’advisa de se saysir, de cette isle et de ces canons ; et de fait, fit accommoder un batteau ou il y avoit dessus deux caques de poudre, dans lesquelles il y avoit des ressorts quy y devroint mettre le feu des qu’ils desbanderoint, et on avoit mis une perche a chascune de ces caques, ausquelles estoint attachées des cordes quy faisoint desbander les ressorts quand elles rencontroint quelque resistance quy les faisoit plier ; puis on conduisit ce batteau au fil de l’eau du pont des Turcs quy donnoit communication a la petite isle, et lors qu’il vint a passer entre deux batteaux, ces perches quy furent arrestées par le pont firent l’effet que l’on s’en estoit promis, et rompirent le pont. Le Rosworm avoit ordonné quarante chayques quy, dans la nuit obscure quy estoit entre le jeudy et le vendredy 11e d’octobre[1], devoint descendre dans l’isle, tuer

  1. Le vendredi était le 10 octobre.