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1613. janvier.

naturelle fierté ; que pour moy je n’improuvois pas que Mr de Guyse eut un peu de ressentiment. Sur cela je la quittay ; et elle, voyant en suitte la reine, luy dit que j’animois son fils contre elle, et luy fit sçavoir tout ce que je luy avois dit ; dont la reine fut bien ayse, et que je n’eusse rien descouvert a madame de Guyse de nostre dessein.

Je m’en vins a la chambre de madame la princesse de Conty, ou je trouvay Mr de Pralain quy parloit a Mr de Guyse. Cela me donna le moyen de parler a elle, et de luy descouvrir ce quy se passoit, et des moyens qu’il y avoit de remettre leur mayson et de le bien remettre avec la reine, pourveu que l’on embrassat chaudement l’occasion quy se presentoit en nos mains, et que nous ne la laissions eschapper. Elle estoit la plus habile, la plus adroitte, secrette, et capable princesse que j’aye jammais connue, et quy sçavoit aussy bien sa court. Je luy jettay a ses piés l’abbaïe de Saint-Germain et le retour de la Rochefoucaut seulement : bien luy dis-je que quand il y faudroit adjouster une bonne somme d’argent, que je luy en respondois ; mais je ne parlay point de la lieutenance generale de Provence. Elle fut ravie de voir qu’elle pouvoit parler les mains garnies. Je luy priay d’envoyer querir madame sa belle-sœur, et de mettre promptement les fers au feu, parce que cette affaire devoit estre faitte ou faillie dans vingt et quattre heures ; ce qu’elle fit, et, peu apres, monsieur son frere estant party, Mr de Pralain se mit en tiers avesques nous, quy fit aussy de son costé ce qu’il peut.

J’allay de la cheux Zammet, avesques lequel ayant communiqué des moyens que nous pourrions tenir