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journal de ma vie

noblesse quy alla avesques luy, quy estoint de plus de cent gentilshommes de condition quy marcherent jusques a Siguet avesques le regiment de mon oncle, quy s’embarqua à Oulme[1]. Ce fut en ce voyage que cette forte amitié se fit entre Mr de Guyse et feu mon pere, quy depuis jusques a sa mort, luy a constamment gardé son cœur et son service ; et que mon dit sieur de Guyse l’a chery sur tous ses autres serviteurs et affectionnés, l’appelant l’amy du cœur[2].

Mon pere demeura deux ans en Hongrie, et ne s’en revint qu’apres le deces de feu mon oncle, son frere le colonel, lequel mourut à Vienne comme a esté dit cy dessus. Il fut rappellé par le roy Charles IXe, lors fait majeur, quy peu de temps apres, luy donna la charge de collonel de quinse cens chevaux reitres, qu’il n’avoit encores dix neuf ans accomplis. Il donna aussy pareille charge en mesme temps à son cousin germain, le comte Charles de Mansfeld, quy avoit aussy esté nourry jeune avesques luy, et qu’il aymoit fort : et tous deux ayans prié feu mon oncle Glaude Antoine de Bassompierre de venir les ayder a faire leurs capitulations, le malheur arriva a feu mon pere que, se jouant avesques son espée, a l’hostel de Tanchou au marché neuf, il blessa au petit ventre mondit oncle d’une fort légère blesseure quy, pour avoir esté négligée, luy causa la mort.

Ces deux cousins, avesques d’autres colonels (quy

  1. Ulm, en Souabe, sur le Danube.
  2. D’Aubigné, dans son Histoire universelle (t. III, liv. I, éd. de Maíllé), rapporte une lettre du duc de Guise à Christophe de Bassompierre, en date du 21 mai 1588 ; elle est signée seulement : l’ami de cœur.