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1618. mai.

choses qu’il ne devoit pas sçavoir si cruement. En fin apres m’avoir longtemps parlé, il me pria d’asseurer Sa Majesté que le lendemain avant midy il seroit hors de Paris, comme il fit : et le roy y arriva le soir. Or Mr d’Espernon s’en alla a Fontenay[1] ou il demeura encores sept ou huit jours ; dont le roy entra en telle colere qu’il envoya loger a Rosoy ses chevaux legers : et monsieur le chancelier quy estoit amy de Mr d’Espernon, luy manda par Guron[2] qu’il feroit bien de partir et de s’en aller a Mets. Guron luy porta la nouvelle sy chaude qu’il partit a l’heure mesme, et a grandes journées se rendit a Mets[3].

Peu apres on fit rouer a Paris les Siti, et Durant[4],

  1. Le 7 mai. — Fontenay, village du canton de Rozoy-en-Brie, arrondissement de Coulommiers, département de Seine-et-Marne, où le duc d’Épernon avait une terre.
  2. Jean de Rechignevoisin, seigneur de Guron, fils de Gabriel de Rechignevoisin, seigneur de Guron, et de Catherine Frotier, sa seconde femme, mourut en 1635.
  3. Le duc d’Épernon arriva à Metz le 20 mai.
  4. François et André Siti, frères Florentins, et Étienne Durand, jeune poëte. Par un arrêt de la justice exceptionnelle du Conseil du 19 juillet 1618, exécuté le même jour, ces trois infortunés furent condamnés « pour raison de livres et discours faicts et composés et escrits contre l’honneur et l’authorité du roy, pratiques et factions et menées contre son service, bien et repos de son estat, tant dedans que dehors le royaume, lesdits livres et discours, memoires et lettres desdits François et André Sity, tant en langue françoise qu’italiene et en chiffre. » (Manuscrits de Dupuy, n° 92, fol. 103.) Suivant les Mémoires de monsieur Deageant, les Siti, serviteurs de la famille de Concini, étaient des émissaires de l’agent du duc de Florence à Paris, qui cabalait en faveur de la reine-mère. André Siti fut pendu ; François Siti et Durand furent rompus vifs, leurs corps brûlés, et leurs cendres jetées au vent. L’histoire d’Étienne Durand, écrite par Colletet,