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1620. juillet.

la reçois comme vous me la donnés. » C’estoit assés luy dire, s’il l’eut sceu entendre : mais luy au contraire se mit a jurer qu’il me disoit la pure verité, et que dans trois heures il seroit a moy ; qu’il l’avoit devancé pour estre mieux monté, affin que je l’attendisse a souper. Je luy dis que je ne le croyois point, et qu’il trouveroit un mauvais souper s’il y venoit, et qu’il estoit trop avisé pour le faire ; mais que je le croyois en Normandie et aussy bon serviteur du roy que luy estoit un medisant. Je luy dis de plus : « Sçavés vous bien que vous parlés a celuy que s’il croyoit ce que vous dittes, seroit obligé de vous envoyer en prison ou vous courriés grande fortune, estant capitaine aux vieux regimens comme vous estes ? » Lors il se mit a jurer plus que devant qu’il me disoit la verité et que dans deux heures je le verrois. Allors je luy dis : « Monsieur de Villedonay, je ne crois pas que cela soit ; mais sy par fortune il estoit, vous feriés bien, et vous et luy, de ne vous trouver pas en lieu ou j’aye puissance : car je vous mettrois l’un et l’autre en lieu d’ou je pourrois respondre de vous. » Allors me voyant fasché il s’en alla, et je creus qu’il estoit allé advertir Mr le cardinal de Guyse de ma response : mais au contraire il s’en alla a Saint Disier pratiquer le Besme et la compagnie de chevaux legers de Mr de Guyse, quy de bonne fortune ayans esté prevenus par mes amis se sceurent bien garder de luy.

Au sortir de cheux madame de Frenicourt, comme je m’en allois souper avesques toute cette grande compagnie, [le lieutenant coronel de Champaigne][1] Pi-

  1. Inédit.