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journal de ma vie.

chose pour descharger messieurs du quartier de Picardie et en charger vos espaules ; c’est pourquoy il vous faut bien prendre garde a ce que vous dirés. Ces messieurs n’ont pas voulu faire la descente dans le fossé du bastion du Moustier, et ne sçavent plus ou ils en sont. Ils disent que s’ils avoint vos canons avesques les leurs, ils prendroint infailliblement Montauban ; ils esperent que vous ne les voudrés pas bailler, affin d’en jetter la faute sur vous : au nom de Dieu, ne le faites pas. Vous avés desja eu l’honneur d’avoir deffait le secours ; toutes choses sont encores entieres pour vous : mais l’hiver s’approche plus viste de nous que nous ne nous approchons de Montauban ; les maladies attaquent desja l’armée, et elle s’affoiblit tous les jours. Sy ces messieurs sçavent une finesse pour prendre Montauban, n’envions point leur science : ils nous epargneront bien de la peine et peut estre des coups, et outre plus prennent sur eux une chose bien hasardeuse dont ils nous veulent descharger. Ne me demandés pas d’ou je sçay cette nouvelle, mais profités en. » Messieurs les mareschaux creurent que le roy me l’avoit ditte, et me dirent qu’ils se conformeroint en ce que je leur conseillois, et que pas un ne respondroit sans l’avis de tous trois, et me voulurent faire cet honneur de m’adjoindre a leurs resolutions.

Sur cet instant le roy nous commanda de nous asseoir. Puis monsieur le connestable nous dit que la prise de Montauban estoit sy importante au bien du service du roy, que tous ses serviteurs se devoint porter avesques une passion violente a luy faire conquerir, et quitter toutes les emulations, jalousies et