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1622. mai.

couvroit la fusée[1] de la mine, et lors Lancheres fut le premier a le dissuader ce qu’il luy avoit precedemment proposé. Je luy montray aussy qu’en ouvrant vis a vis de ce fossé du retranchement et creusant des places pour monter des mousquetaires, nous aurions l’eminence sur l’autre piece[2] des ennemis que nous gaignerions en mesme temps. Mr de Pralain m’embrassa et me dit : « Mon fils, vous avés eu bon nés, et m’avés empesché de recevoir un affront, et le roy une perte ; dont je vous remercie. Continués comme vous l’entendrés ; je vous en laisse le soin. »

Ainsy j’empeschay une tres mauvaise affaire que nous allions entreprendre, et ayans continué de passer le long du bastion, toujours marchans entre deux terres, comme la nuit fut venue, je fis ouvrir dans le bastion vers le lieu ou les ennemis avoint fait le fossé du retranchement, et en suitte j’envoyay deux pionniers des mieux entendus ausquels j’ordonnay d’aller doucement oster cette terre quy faisoit eminence dans ce dit fossé, et qu’ayans trouvé une ou deux caisses quarrées de bois, plus longues que larges, ils les tirassent doucement sans respandre les poudres et rasines quy estoint dedans, et puis qu’ils couvrissent les deux trous de plus de deux piés de terre, et qu’ils prissent bien garde de ne laisser aucune poudre dans la place ; ce qu’ils executerent tres bien, comme je vis peu de temps apres moy mesme.

Cependant Mr le mareschal de Pralain et moy, mandés par le roy, l’allasmes trouver et luy dismes que

  1. Il y avait aux précédentes éditions : le fossé.
  2. Il y avait : toute la pièce.