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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 4.djvu/21

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journal de ma vie.

Cordeliers du faubourg de Suse, et tous les princes et la noblesse y vindrent repaitre avesques nous, joyeux et contens d’avoir sy bien et heureusement servy le roy, quy nous envoya l'abbé de Beauveau premierement, et puis son escuier de quartier pour dire a Mr de Crequy et a moy la satisfaction qu’il avoit de nous et la reconnoissance perpetuelle qu’il en auroit, nous blamant neammoins, Mr de Crequy et moy, de ce qu’estans ses lieutenans generaux, nous avions voulu donner avec les enfans perdus, et nous mandant qu’il ne nous envoyeroit plus ensemble, parce que par emulation l’un de l’autre nous faisions ce prejudice a son service que, sy nous nous y eussions fait tuer, outre la perte qu’il eut faite de deux telles personnes, le desordre se fut mis dans cette occasion faute de chefs pour la commander. Nous luy mandasmes qu’il y a des choses quy se doivent faire avec retenue et d’autres avec precipitation ; que celle cy estoit une affaire ou il ne falloit point marchander, mais y mettre le tout pour le tout, parce que, sy nous eussions esté repoussés a la premiere attaque, nous l’eussions en suitte esté a toutes les autres, et que des soldats quy voyent de tels chefs a leur teste y vont bien avec plus de courage et de resolution.

Pendant le combat des barricades, Mr le comte de Saut quy estoit allé par dessous Jallon pour prendre les ennemis par derriere, eux quy s’en douttoint, avoint mis sur l’avenue ou il devoit passer le collonel Belon[1] avec son regiment pour la garder ; mais il les surprit a la pointe du jour et deffit le regiment, prit

  1. Marc-Antoine Belon commandait un régiment de Milanais.