Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/143

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française de la démarche que nous comptions faire.

CÉCILE.

Vous les avez là, Monsieur ?… (Avidement.) Si… si… je veux les voir tout de suite, je veux les reconnaître.

L’ENVOYÉ, (hésitant.)

Je redoute pour vous une commotion.

CÉCILE.

Donnez, donnez !

(Alors il sort du portefeuille un paquet cacheté de gros cachets rouges. Il le pose lentement, respectueusement sur la table. À cet instant les deux femmes restent terrifiées, le cœur battant devant cette chose inconnue et mystérieuse.)
CÉCILE.

J’ai peur !… J’ai peur !… (Une espèce de terreur sacrée les emplit toutes deux. L’envoyé fait sauter les cachets, et développe le papier qui recouvrait les objets. Le paquet s’ouvre. D’aussi loin qu’elle reconnaît les objets, Cécile pousse un gémissement affreux.) Oui ! Oui ! Je reconnais, je vois, je vois, c’est ça ! c’est ça ! (Elle se précipite et porte à ses lèvres les objets, la montre, la plaque.) Sa plaque ! son nom et puis ça, tenez, Ginette, ça… Vous vous rappelez ces souvenirs ? Pierre ! Pierre ! mon chéri… Le portefeuille que je lui avais donné l’année dernière. Oh ! il me semble que c’est lui que je touche tout à coup… Il me semble que c’est lui que j’embrasse… Ce portefeuille encore tout chaud de sa poitrine.

(Elle le tient contre elle puis le couvre de caresses, en se penchant sur la table. Ginette n’a plus la force d’aller à elle. L’homme demande d’un geste s’il faut rester ou s’en aller. Pendant que Cécile est effondrée sur les reliques.)