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Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/176

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que toutes les femmes s’embrassent dans la même émotion, les femmes du peuple comme celles de l’aristocratie ! Y aura-t-il toujours la haine des races ?

UN SOLDAT.

Mère Thibault, vous me dégoûtez !… Si je suis encore là, c’est à vos remplaçantes que je le dois. Allez, verse tes dix francs, et va-t-en !

LE SOLDAT DE GINETTE.

Oui, elle nous dégoûte… À la porte !… Tu parles trop.

LA FEMME.

Pendant trois ans que j’ai trimé dans les champs en pleurant, j’ai pas dit un mot à qui que ce soit !

LE BLESSÉ 122, (désignant Ginette qui écoutait sans rien dire.)

Tenez, en voilà une qui n’a que du bien sur la conscience !… En voilà une pour qui, hommes et femmes, ne doivent avoir que de la reconnaissance. Maintenant, Mademoiselle, que la guerre est finie, il me semble que chaque fois que je vous rencontrerai, je vous devrai le salut militaire, comme à un supérieur !

(La femme, à pas traînants, l’épaule haute, l’œil sournois, s’en va, pendant que les hommes lui lancent des quolibets.)
UN HOMME, (jetant sa casquette en l’air.)

Vivent les petites femmes de France !… Ohé !…

GINETTE.

Mais, j’étais comme les autres… ni plus, ni moins… Il y en a eu de tellement mieux que moi… il y en a eu de sublimes… voilà ce que cette pauvre femme bornée a peine à croire !