Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 10, 1922.djvu/283

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quand j’ai vu stopper l’auto du directeur du Français, je n’ai fait ni une ni deux… En ma qualité de vieux bohème incivil qui peut prendre sur soi toutes les gaffes… j’ai enfilé l’escalier !… Et je viens vous chercher, Dartès ; les camarades vous attendent chez le bistro… Je vous ai fait verser votre vermouth grenadine !… Alors, on descend ? Ils sont cent cinquante en bas qui ont une envie furieuse de vous serrer dans leurs bras !…

DARTÈS.

Je n’ai pas encore pris ma détermination !…

WHEIL.

Ah ! ça. Monsieur Donadieu, m’expliquerez-vous pourquoi votre parti tient tant à mettre un littérateur pur comme Dartès à la tête d’un journal prolétarien ! Ce n’est pas ce libertaire de cabinet qui ébranlera la Jéricho capitaliste !

DONADIEU.

Pourquoi nous l’accueillons ?… Comme en d’autres temps nous eussions accueilli Lamartine, Zola et d’autres, s’ils étaient venus à nous !… (Il écrit en l’air avec son doigt.) D. A. R. T. È. S…, un nom qui fait bien sur l’affiche ! Oh ! il y en a des noms de plus dans le mouvement, je le reconnais, mais, tel quel, c’est un excellent instrument d’émancipation !…

WHEIL, (à Dartès.)

Je ne vous donne pas un mois pour divorcer d’avec ces gens-là, Dartès !… Je le prophétise, Monsieur Donadieu ; un homme pas plus qu’un peuple ne change de moelle ni de muscles en quatre ou cinq jours !…

DONADIEU.

Qu’en savez-vous ? Il y a des routes de Damas