Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 11, 1922.djvu/90

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DON JUAN, (désignant le groupe.)

Puisque tu la connais, parle à la mère un instant… parle-lui du crime et du criminel, elle t’écoutera… Je voudrais pendant ce temps embrasser ce petit et lui donner un souvenir. (Alonso va saluer la comtesse en passant entre elle et le petit. Don Juan tire l’enfant par la manche et l’attire.) Mon enfant, viens ici… Au nom de ce mort, laisse-moi te donner une bague qui lui appartient et qu’il m’a chargé de te remettre… Tu permets que je t’embrasse ?…

L’ENFANT, (étonné.)

Oui, Monsieur.

(Il l’embrasse.)
DON JUAN.

Garde ceci. Quand tu seras grand, tu passeras cette bague à ton doigt, et toutes les femmes baiseront l’anneau et la main que tu leur tendras, car tu es beau… Tu ressembles à la jeunesse de Don Juan. Tu as ses cheveux bouclés et sa lèvre altière. Tu auras son beau destin d’amour. Plus tard, tu comprendras l’inscription de la bague que je te donne aujourd’hui…

(Il lui passe la bague au doigt.)
L’ENFANT.

Quelle inscription ?

DON JUAN.

« L’amour, c’est la guerre » !… (L’enfant lève vers lui deux yeux étonnés et incompréhensifs.) Tu es trop jeune encore pour comprendre qu’il n’y a ici-bas que des vainqueurs et des vaincus… L’amour, c’est la victoire ou la défaite !… Triomphe, petit, à ton tour, je te le souhaite de tout mon