Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 12, 1922.djvu/331

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BLEUETTE.

Maman ? non… Elle s’est fatiguée sur place.

MADAME LEVASSEUR.

Hélas ! comme tant de gens… tant de pauvres gens… même pas exposés…

PHILIPPE.

On est toujours exposé… à vieillir.

LEVASSEUR.

Madame Sorbier a accepté de bon cœur que vous alliez à l’ambulance… Vous étiez si jeune !

BLEUETTE.

Il n’aurait plus manqué qu’on m’empêche d’y aller… on aurait vu ça !

MADAME LEVASSEUR.

Bien dit ! Voilà ce qu’étaient nos filles et nos fils ! et, au fond, nous ne nous en doutions pas ! La guerre nous aura servi à nous découvrir. C’est une banalité de le constater.

LEVASSEUR.

Oui, oui, ma femme a raison… et les journaux aussi… Les valeurs morales… (À Bleuette.) Un peu de porto, ma chère enfant ?

BLEUETTE.

Merci, non.

MADAME LEVASSEUR.

Tenez, moi-même, je reconnais qu’avant la guerre, j’avais des idées un peu étroites, des préjugés…