Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 2, 1922.djvu/34

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logique, qu’elle s’immole à ta royauté. Tu es la vie bête, adorable, inconsciente et pour cela sublime. Pardon de t’avoir troublée », il eût fallu qu’il s’indignât au contraire et qu’il flétrît la rose de ses jours en des termes tels qu’on en doit aux hétaïres de ce genre. Il eût fallu qu’il s’évadât de ce que tout esprit bien pensant dénomme la lâcheté morale, par la porte de l’idéal et de la dignité humaine, si j’ose employer une aussi palpitante métaphore que je dédie à Joseph Prudhomme.

Pauvre bon bougre à l’obscur héroïsme !

Poliche n’a pas été compris de Rosine, il était juste qu’il ne le fût pas de la foule moyenne qui présente, avec Rosine, une similitude manifeste. Comme elle, elle éprouve le besoin d’être distraite, d’être subjuguée ; elle veut que le rire soit dans l’amour, la bestialité dans la passion ; elle est une maîtresse exigeante, superficielle et insatisfaite. Poliche dit : « Je suis ennuyeux. » Il a raison. Et s’il a su le prouver et si le public le lui a montré, c’est que la philosophie de la pièce n’était pas dénuée de quelque vérité. Et j’ai fort bien fait d’envoyer ce balourd à Lyon. Qu’il y reste ! C’est à la foule, symbolisée par le monsieur qui passe, qu’il balbutie en s’en allant, très humblement : « Pardon. »

On a trop dit au Français qu’il avait du goût. Il a fini par le croire. Le moindre boutiquier se targue de cet apanage qu’il croit héréditaire et constitutionnel. Il supporte vaillamment les platitudes pornographiques de mille vaudevilles parce qu’elles sont exprimées avec décence, facticité et selon des coutumes nationales. Mais soudain un mot vrai le choque. Il est blessé. N’y touchons pas… Taine le premier a dit fortement que le