Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 2, 1922.djvu/347

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gente, monsieur, pour deviner de quel sacrifice vous seriez capable pour Isabelle !… Mais non, c’est impossible, tout de même !… Vous ne pouvez pas aller, même à cause d’elle, jusqu’à vous charger de moi, et vous traîneriez un bien pauvre petit paquet !… Merci… Je n’ai besoin d’aucun secours… Je m’en tirerai toute seule !

PIERRE.

Ah, mais ! savez-vous que vous êtes très chic, décidément !… Vous avez raison, je lançais à tout hasard cette bouée de sauvetage, oh ! sans bien y croire, à l’aveuglette, et pour voir ce que vous en diriez… mais vous avez raison, malgré ce qu’aurait de tentant l’idée paradoxale de nous unir tous deux pour leur seul bonheur, nous ne le pouvons pas !…

JEANNINE.

C’est bien tout de même d’y avoir songé !

PIERRE.

Oui c’est bien, parbleu, oui, c’est très bien !… Voilà ce qu’il faut se dire !… Et je suis très content de nous !… Ah ! mais par exemple, ce qui est fort possible, ce que j’exige, c’est qu’après nous être connus et rapprochés comme nous venons de le faire, nous ne nous quittions pas comme cela !… Ah ! mais non !… Vous m’intéressez diablement, savez-vous !… Il faut que nous devenions une bonne paire d’amis… dites, vous voulez ?… Madame Heiman, c’est bien sec ! même en voyage… Vous avez besoin d’un meilleur confident… Attendez, attendez un peu, vous allez voir ! C’est moi qui vais me charger de votre éducation !… Promettez-moi d’abord qu’on s’écrira, tous les deux ?… Ce sera très gentil, très touchant !… On parlera d’eux, on se dira leur bonheur… leur gloire… comme de vieux invalides qui n’en veulent pas à leurs généraux de s’être fait casser la tête pour eux !… Ah ! vous verrez, à nous deux comme on se comprendra !… Ils ne savent pas quels êtres charmants nous sommes… Les imbéciles !… N’est-ce pas que je