Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 4, 1922.djvu/264

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vite, vite, je me remettais à imiter Sarah Bernhardt sur le pont d’un navire.

BOUDIER.

Bien, bien !… De là ton avatar et la réputation que tu t’es faite dans le monde de la pâle noce !

POLICHE.

Oui. Je compris tout de suite le parti qu’il y aurait à tirer de ce qu’on me demandait… J’eus tôt fait de refouler ma tendresse, ma sensibilité, mon immense amour… de n’en rien laisser percer, surtout !… Tout était là !… J’ai l’air d’une bête, mais je suis un sage… Je sus me rendre indispensable… Je fus le Poliche de toutes les minutes, le remède contre le spleen… le gros sans-souci qui ne peut pas comprendre le cœur des femmes… l’organisateur des journées d’ennui… l’homme des bars !… Le boulevard m’a bien accueilli… Je me suis fait pochard par amour, cynique par nécessité… Je ne me décris pas, tu m’as vu dans l’exercice de mes fonctions !

BOUDIER.

Par les petites dames de Lyon, j’arrive très bien à m’imaginer ce que doit être l’ennui quotidien de ces dames de Paris. Toutes plus ou moins ont un commensal dans ton genre… toutes ont leur Poliche… Tu es un exemplaire très répandu dans le monde de la galanterie… Mais, au moins, avais-tu les faveurs de la patronne ?

POLICHE.

Attends, attends !… Nous y voilà. Je guettais la minute favorable où d’un rire on glisserait à une