Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 5, 1922.djvu/260

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CHARLOTTE.

Oh ! si. Comment peux-tu dire des mots pareils pour exprimer le trouble, l’espèce d’effarement où je me suis trouvée quand nos yeux se sont rencontrés pour la première fois ? Tu aurais posé, à cette minute, la main sur mon épaule, je me serais laissé tomber dans tes bras… Comment est-ce possible que ce soit moi, là, toute tremblante, égarée, heureuse, dans les bras serrés d’un amant ?… Quel souvenir j’emporterai de cet été, de cet endroit auquel j’aurai donné tout mon cœur ! Plus tard, quand je reverrai ces étoiles derrière ton chapeau, le bruit du jet d’eau tout près, la retraite, là-bas…

(On entend au loin le tambour.)
ARTANEZZO.
(Ils se poussent dans l’omhre des arbres. Jeannetier et Férioul passent en se promenant et en fumant.)

Fais attention, on passe…

JEANNETIER.

Eh ! le fond de l’air est frisquet, tout de même ! Encore des couples qui se cachent derrière les arbres. Tu as vu ?

FÉRIOUL.

Il n’y a que ça ici ! L’amiral Gravière a raison…

JEANNETIER.

Ben, oui, l’amour… l’amour. Il faut bien ça pour que la terre tourne.