Oui, certainement, je le pense, je le pense de toutes mes forces…
C’est bien ce qu’il y a de plus abominable, c’est que tu le penses ! C’est qu’en effet tu peux me croire toutes les qualités, sans m’aimer pour cela, si peu que ce soit !
Fanny, si j’osais m’expliquer, si je l’osais, j’irais jusqu’à dire, en toute sincérité, que…
Que tu m’aimes ?… Eh bien, ne le dis pas, car ce ne serait pas vrai. Oh ! je sais que, malgré tout, tu as de l’affection pour moi. Tu vois jusqu’où je vais ? Qui sait même si, à certaines moments de ta vie, dans les grands jours, tu n’as pas eu de la tendresse !…
Une tendresse immense, une sympathie de tous les instants…
C’est bien possible ! Mais tu ne m’as jamais aimée, Marcel, tu ne m’as jamais aimée… (Elle hésite.) physiquement. Oh ! ne proteste pas ! ce sont des choses qu’on n’ose pas se dire durant quinze ans… on ne l’ose pas, par un sentiment humilié facile à comprendre, mais, maintenant, qu’est-ce que je risque à me l’avouer !… Tu m’as désirée huit jours, un mois peut-être…, tu vois que je précise…, les premiers temps de notre mariage ! Et encore ! En tout cas, ç’a été tout ! Pourquoi ? j’en valais bien une autre ; je n’étais pas laide : je n’étais pas sotte ; bien des hommes m’ont fait