Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 6, 1922.djvu/28

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L’ABBÉ.

Comment plaidé ? Faut-il entendre par là…

LE DUC.

J’en ai trop dit ! Tant pis ! À vous seul, Monsieur l’abbé, je ne cacherai pas son nom.

L’ABBÉ.

Je me considère lié autant que je le serais par le secret de la confession.

LE DUC.

Oh ! il ne s’agit pas d’un lascar quelconque, à la responsabilité plus ou moins atténuée par l’alcool, la noce… non, non, ma fille a l’honneur d’avoir été la maîtresse d’un homme éminent, admirablement conscient de ses actes, dévoué aux causes de la justice, défenseur attitré de l’honneur, un homme de grand talent, l’éloquence du barreau, comme vous celle de la chaire… quarante ans, officiel, ex-bâtonnier, conseil de l’Ordre… Admirable, vous dis-je !… le gredin !… Armaury.

L’ABBÉ.

Comment, Armaury, l’avocat ?

LE DUC.

Oui, oui, d’assises… le saint François d’Assise, comme on l’appelle spirituellement au palais. C’était mon avocat ! Vous voyez que j’ai eu la main heureuse ! Je lui confiai, il y a quelques années, un procès embrouillé d’héritage… vous savez, mes biens d’Evêquemont ?… À la suite de quoi, relations suivies… Sa femme est agréable ; lui, passe pour un beau parleur, séduisant, il faisait bien à table ou au fumoir… les avocats et les chirurgiens de nos jours sont l’étincellement des dîners. C’est bien un signe de l’époque, d’ailleurs :