Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 6, 1922.djvu/61

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MADAME ARMAURY.

Non, ça, c’est ma douleur à moi, c’est mon lot, comme vous dites !… car, enfin… je me permets d’observer qu’il ne s’agit pas tout de même d’un viol ; d’après ce que j’ai lu à l’instant, il me semble bien que votre fille était plus que consentante… Elle l’aimait !… Ils s’aimaient.

LE DUC.

Eh bien ?… Après ?

LA DUCHESSE.

Se faire aimer d’une jeune fille, lui tendre le piège de l’amour pour la faire trébucher, comme c’est difficile. Nous autres, femmes, nous savons comme il est aisé de troubler n’importe quelle enfant de seize ans !…

MADAME ARMAURY.

Puis-je vous demander de jeter les yeux sur une de ces lettres ?…

LE DUC.

Au choix, tenez…

(Elle lit, mais ses yeux se brouillent sans doute, car elle ne peut continuer.)
MADAME ARMAURY.

Non, non… reprenez ces choses, c’est trop affreux… ça fait trop de mal… J’en sais plus qu’il ne faut… (Elle répète toujours machinalement.) Ah ! je n’aurais jamais cru cela de lui !…

LE DUC, (résolu.)

Vous allez le revoir, Madame. C’est à vous qu’incombe la mission de lui apprendre que tout est découvert. Dites-lui qu’il a la vie sauve, mais qu’il n’ait pas le malheur de chercher une seule