la même palinodie ; j’ai cité : l’Enchantement, Maman Colibri, Poliche. Et je songe que si l’on avait tout de suite rendu justice à la mentalité de ces pièces et à leur probité artistique, au lieu de les honnir au début, il n’y aurait plus maintenant à souffler sur cette fumée encombrante et asphyxiante, qui se renouvelle à chaque expérience, et devient procédé stratégique chez une certaine opposition. « Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose », comme disait un grand créateur de légendes ! Et, de fait, la légende a le plus souvent force acquise. Ceux qui la créent savent bien ce qu’ils font. La postérité elle-même l’accepte sans contrôle, et que de fois elle a été la dupe d’une poignée d’anecdotiers ou de mystificateurs ! La pure spiritualité d’un Baudelaire, pour ne pas remonter plus haut, ne porte-t-elle pas, devant le public, le poids d’une légende suspecte, créée par ses contemporains ?… Les salisseurs professionnels sont d’habiles psychologues ! Croyez-vous que lorsqu’un Ferdinand Brunetière écrivait des choses déshonorantes, comme celles que je cite ici, à propos de Baudelaire, il faisait œuvre de critique ou de malfaiteur ?
« Le pauvre diable (Baudelaire) n’avait rien du poète que la rage de le devenir. Non seulement le style mais l’harmonie, l’imagination lui manquent. Si Baudelaire ne fut pas ce qu’on appelle un fou, du moins fut-ce un malade, et il faut avoir pitié d’un malade… Ce serait un scandale, ou plutôt une espèce d’obscénité que de voir un Baudelaire en bronze de son piédestal continuer de mystifier les collégiens. Il faut bien que quelqu’un le dise !… » Non, ce critique était conscient de son mensonge. Plein de fiel et d’envie, il profi-