Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/280

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DARNIS.

Ah ! nous connaissons sa formidable indépendance !

(Madame de Chevrigny, qui a lu la première, passe la lettre à Darnis qui se lève et lui-même, quand il l’aura lue, la passera aux deux autres.)
MADAME DE CHEVRIGNY, (pendant qu’ils lisent la lettre, tire Henriette à sa droite.)

Ma chérie, je crains, tout bien réfléchi, que votre maman ne m’en veuille beaucoup !… Quand votre parrain est venu tout à l’heure chez moi me demander de l’accompagner, mon premier mouvement a été de mettre mon chapeau, et je suis accourue puisque vous m’en priiez. Mais, en chemin, je me demandais déjà si je ne vous serais pas plus utile en parlant à votre mère seule à seule, et en agissant par persuasion. Elle va trouver bien étrange que j’intervienne, sans autre titre que mon amitié, dans un débat d’ordre aussi intime. Dame ! Elle pourra justement me reprocher de ne l’avoir même pas avisée par un coup de téléphone… Il eût peut-être été préférable que ma visite revêtit une apparence plus spontanée.

HENRIETTE, (vivement.)

Non ! non ! Ne me faites pas faux bond ! Vous savez bien que maman vous adore et que, même si elle vous battait froid, après quelques jours il n’y paraîtrait plus. D’abord, votre présence l’intimidera un peu et l’empêchera d’envoyer promener tout le monde comme elle en serait capable dans un premier mouvement… Et puis… vous parlerez… oui… car il y a ça aussi ! Je crains les gaffes, je me méfie de l’éloquence gauche de Fernand et aussi de celle de ce vieil Arnould… cet Arnould qu’elle n’a jamais pu encaisser… Alors,