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Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 8, 1922.djvu/329

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faite belle, fortunée et parfaitement éduquée… Je suis quitte envers toi. Pour une désillusion, tu ne te doutes pas des richesses que contient l’avenir ! Ce chagrin passera plus vite que tu ne le penses… Tu n’aurais obtenu ce que tu crois le bonheur qu’à un prix honteux, qu’aucune obligation, aucune morale ne peut me contraindre à payer… Non, je n’ai pas ce devoir-là, je l’affirme… et tiens… je suis toute tremblante d’indignation d’avoir à te le redire une fois.

HENRIETTE.

En mettant au monde des enfants qui n’ont pas droit au même bonheur que les autres, qui ne sont pas appelés aux mêmes prérogatives, on se crée des devoirs qui dépassent ceux, bien légers, que tu as consentis jusqu’ici à ta fille !

HONORINE.

Je n’ai pas accompli tous mes devoirs maternels ?

HENRIETTE.

Non ! Pas tous.

HONORINE.

Répète-le.

HENRIETTE.

Non… pas de sacrifices, en tout cas, proportionnés à l’injustice de ma destinée et de ma naissance.

HONORINE.

Qu’en sais-tu ?… Ah ! je ne t’ai pas fait de sacrifice ? Eh bien, devant une affirmation aussi inique, je vais te révéler ce dont tu n’as peut-être aucun soupçon !… Pour toi, j’ai déchiré mes entrailles et mon cœur… sache-le ! Pour toi seule, je te le jure !… Je t’ai sacrifié ma dernière ten-