nous appellons peindre d’après nature. Et tout n’est-il pas dit dans ce seul mot : ex noto fictum carmen sequar. Je feindrai, j’imaginerai d’après ce qui est connu des hommes. On y sera trompé, on croira voir la nature elle-même, & qu’il n’est rien de si aisé que de la peindre de cette sorte : mais ce sera une fiction, un ouvrage de génie, au-dessus des forces de tout esprit médiocre, sudet multùm frustràque laboret.
Les termes mêmes dont les anciens se sont servis en parlant de Poësie, prouvent qu’ils la regardoient comme une imitation : les Grecs disoient ποιεῖν & μίμᾷν. Les latins traduisoient le premier terme par facere ; les bons auteurs disent facere Poema, c’est-à-dire, forger, fabriquer, créer : & le second ils l’ont rendu, tantôt par fingere, & tantôt par imitari, qui signifie autant une imitation artificielle, telle qu’elle est dans les