Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/154

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de vingt quatre heures, si les propriétaires étoient d’accord avec quelque autre contractant. Vouloir connoître le revenu clair et liquide annuel de chaque terre par estimation commune de son état habituel, c’est donc chercher une chose toute trouvée. Supposé que la jouissance de chaque fonds particulier vînt à tomber par succession indivise à divers cohéritiers, croyez-vous qu’il leur seroit impossible et même difficile de régler la portion qui appartiendroit à chacun d’eux dans le produit net ? Non sans doute : c’est une opération qui se fait tous les jours. Eh bien, c’est la seule à faire pour la perception économique des vrais revenus de l’etat. Le mandataire local de la souveraineté, chargé de réclamer la portion fixe et déterminée du produit net qui forme le patrimoine public, n’a que cette opération à faire de temps en temps à des époques fixes et réglées avec chaque propriétaire foncier. La méthode est pour lui toute simple, toute naturelle ; comme entre cohéritiers de bonne foi qui veulent partager ; comme entre voisins qui échangent ; comme entre le vendeur et l’acquéreur ; comme entre l’emprunteur et le prêteur hypothécaire, qui veut savoir la valeur de son hypotheque ; comme entre le proprietaire et le fermier qui se présente pour prendre à bail. Mais le souverain sera trompé par la fraude ou par l’erreur du mandataire local. Premiérement, quel est le genre de perception dans lequel le souverain ne le soit pas, ou par la contrebande, ou par la mauvaise foi des préposés ou par leur négligence ? Secondement, s’il y a quelque occasion où la fraude soit plus rare et moins à craindre, c’est surement celle-ci, qui auroit des milliers de témoins, et une preuve physique toujours subsistante ; car enfin un préposé local dont les opérations estimatives du produit net de chaque héritage de son district seroient rendues publiques, et mises entre les mains de tout le monde, ne pourroit par faveur pour un particulier, faire au souverain un préjudice considérable, sans avoir pour témoins parlants de sa prévarication tout le voisinage du propriétaire et de ses fonds. Les hommes naturellement justes d’une part, envieux et frondeurs de l’autre, ne manquent jamais à déférer de semblables malversations aux supérieurs de ceux qui les commettent : rien ne seroit plus facile que la vérification, puisque l’héritage frauduleusement mal estimé seroit un témoin muet toujours subsistant, toujours prêt à opérer la conviction du coupable, la restitution en faveur du souverain.