Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’argent monnoyé qui circule dans les États policés, fait oublier souvent cette définition des revenus du Souverain et de leur recette journaliere, mais elle n’en reste pas moins vraie pour être perdue de vue dans la plupart des raisonnements soi-disant politiques.

Cet argent monnoyé n’est dans la circulation, comme je l’ai dit autrefois, qu’un titre efficace sur la masse générale des jouissances utiles ou agréables qui font le bien être et la propagation de l’espece humaine.

C’est une espece de lettres de change [84] ou de mandats acquittables à la volonté du porteur.

Au lieu de prélever sa portion en nature sur toutes les subsistances et sur toutes les matieres premieres annuellement renaissantes ; le souverain en exige en monnoies le titre efficace, le mandat, la lettre de change ; il distribue ces titres à ses coopérateurs, et ceux-ci les appliquent à leur destination, en se procurant des subsistances et des matieres plus ou moins façonnées, dont ils jouissent par eux mêmes ou par des salariés qui leur rendent quelques services personnels, ou qui accomplissent pour eux quelque devoir de l’autorité.

Les mandataires du souverain revendent ainsi l’argent du revenu public à la nation qui a commencé par l’avancer l’année derniere, comme gage des jouissances appartenantes à tous les coopérateurs de la souveraineté ; et la Nation dans la nécessité de le réavancer de nou[85]veau, pendant l’année courante, le rachette, en fournissant à ces mandataires les objets nécessaires à leurs travaux ou à leurs jouissances.

Dans quelques Empires mêmes très policés ; tels, par exemple, que celui des Péruviens, et quelques autres, comme l’Égypte et la Chine, les grandes institutions sociales s’étoient établies avant qu’on eut conçu l’idée des monnoies, de leurs usages et des facilités qu’elles procurent ; alors le souverain et ses coopérateurs, recevoient immédiatement et en nature les subsistances et les matieres premieres utiles à leurs travaux ou à leur jouissance.

Depuis l’invention des monnoies, la circulation de l’argent qui forme dans toutes les Nations modernes le revenu de la souveraineté, n’est qu’un moyen d’opérer médiatement cette recette en nature d’une portion des subsistances et des matieres premieres.

[86] Cette observation si simple et si naturelle, conduit par le