Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/76

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Concevons sur une même étendue de sol pareil en qualité, quelques édifices chétifs, malpropres, mal commodes ; tout autour des champs encore pleins de pierres, d’arbustes, de racines, de [129] petits monticules, de grandes cavités, d’eaux croupissantes de sentiers fangeux et d’arbres épars.

Il est manifestement impossible qu’avec le même savoir et les mêmes moyens, un Cultivateur obtienne sur le second territoire autant de récolte que sur le premier ; telle est l’influence des travaux que fait d’abord le Propriétaire foncier sur ceux que doit faire ensuite le Cultivateur.

Ces deux especes d’emplois n’en sont pas moins totalement différentes l’une de l’autre, et c’est peut être un de ces objets importants sur lesquels on fait communément moins d’attention qu’ils ne méritent.

Le Cultivateur en chef se trouve confondu pour l’ordinaire avec l’une ou l’autre des deux divisions, dont il est proprement l’intermédiaire dans les grandes sociétés vraiment policées ; c’est à dire, [130] avec le Propriétaire foncier ou avec le simple manœuvre de culture.

Cette confusion n’est souvent que trop réelle ; et de-là vient que tant de spéculateurs et d’écrivains la supposent toujours comme naturelle, et qu’on s’est même avancé jusqu’au point de regarder comme une irrégularité défectueuse la distinction économique entre le Cultivateur en chef et les deux autres divisions.

En effet, dans plusieurs États et dans plusieurs Provinces, il n’existe point ou presque point de Cultivateurs en chef : de cette race précieuse de vrais Laboureurs, de vrais Fermiers, qui sachent, qui puissent et qui veuillent entreprendre et conduire à leurs frais, risques, périls et fortunes de grandes exploitations productives.

À leur défaut, les préparatifs et les procédés de la culture sont conduits en [131] grandes portions par les Propriétaires fonciers eux-mêmes, et en petites par les simples manouvriers de la culture.

Un même homme peut réunir en effet les trois qualités. Il peut être Propriétaire, soit qu’il ait fait lui-même les avances foncieres, le premier défrichement, les premiers édifices, les premieres plantations, le premier mélange des couches de terre ; soit qu’il ait payé ces travaux en détail à des Ouvriers qu’il dirigeoit ; soit qu’il les ait trouvés tous faits, et qu’il en ait remboursé la valeur à celui dont il a voulu acquérir le droit de propriété fonciere. Il peut être