impénétrable, a amalgamé la sottise avec le génie), a jugé que le moment était opportun pour utiliser cette indomptable manie au profit des buts suivants, auxquels la naissance de Shakspeare ne servira que de prétexte :
I° Préparer et chauffer le succès du livre de V. Hugo sur Shakspeare, livre qui, comme tous ses livres, plein de beautés et de bêtises, va peut-être encore désoler ses plus sincères admirateurs ;
2° Porter un toast au Danemark. La question est palpitante, et on doit bien cela Hamlet, qui est le prince du Danemark le plus connu. Cela sera d’ailleurs mieux en situation que le toast à la Pologne qui a été lancé, m’a-t-on dit, dans un banquet offert à M. Daumier.
Ensuite, et selon les occurrences et le crescendo particulier de la bêtise chez les foules rassemblées dans un seul lieu, porter des toasts à Jean Valjean, à l’abolition de la peine de mort, à l’abolition de la misère, à la Fraternité universelle, à la diffusion des lumières, au vrai Jésus-Christ, législateur des chrétiens, comme on disait jadis, à M. Renan, à M. Havin, etc., enfin à toutes les stupidités propres à ce XIXe siècle, où nous avons le fatigant bonheur de vivre, et où chacun est, à ce qu’il paraît, privé du droit naturel de choisir ses frères.
Monsieur, j’ai oublié de vous dire que les femmes étaient exclues de la fête. De belles épaules, de beaux bras, de beaux visages et de brillantes toilettes auraient pu nuire à l’austérité démocratique d’une telle solennité. Cependant, je crois qu’on pourrait inviter quelques comédiennes, quand ce ne serait que pour leur donner l’idée de jouer un peu Shakspeare et de rivaliser avec les Smithson et les Faucit.
Conservez ma signature, si bon vous semble ; supprimez-la, si vous jugez qu’elle n’a pas assez de valeur.
Veuillez agréer, Monsieur, l’assurance de mes sentiments bien distingués.