Page:Baudelaire - Œuvres posthumes 1908.djvu/320

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rentrer chez eux les gens qui n’auraient pas sur leurs lèvres la grimace du bonheur.

Catilina, un homme d’esprit, sans aucun doute, puisqu’il avait des amis dans le parti contraire au sien, ce qui n’est inintelligible que pour un Belge.

Toujours Horace et Margoton ! Vous vous garderiez bien de choisir Juvénal, Lucain ou Pétrone ; celui-là, avec ses terrifiantes impuretés, ses bouffonneries attristantes (vous prendriez volontiers parti pour Trimalcion, puisqu’il est heureux, avouez-le) ; celui-ci, avec ses regrets de Brutus et de Pompée, ses morts ressuscités, ses sorcières thessaliennes, qui font danser la lune sur l’herbe des plaines désolées ; et cet autre, avec ses éclats de rire pleins de fureur. Car vous n’avez pas manqué d’observer que Juvénal se fâche toujours au profit du pauvre et de l’opprimé ! Ah ! le vilain sale ! — Vive Horace, et tous ceux pour qui Babet est pleine de complaisances !

Trimalcion est bête, mais il est heureux. Il est vaniteux jusqu’à faire crever de rire ses serviteurs, mais il est heureux. Il est abject et immonde, — mais heureux. Il étale un gros luxe et feint de se connaître en délicatesses : il est ridicule, mais il est heureux. — Ah ! pardonnons aux heureux. Le bonheur, une belle et universelle excuse, n’est-ce pas ?